Dans le contexte d’un échange sur le thème de la pensée et des croyances, un de mes amis m’a fait part d’un texte de Maharishi, dont voici un extrait :
Ce qui est important pour nous est la Conscience de Dieu, pas la foi en Dieu ! La foi n’accomplit rien. Je ne veux pas être cruel avec le beau mot « foi » mais c’est juste une perte de temps. Combien de générations sont mortes dans la foi, dans « l’espoir » ?
Tout en étant en sympathie avec l’esprit de ce texte, j’y perçoit une certaine confusion, qui m’a donné envie de faire la réponse qui suit.
Pour que la vie se déploie en nous, il nous faut faire un retour concret à l’expérience. Et pour cela il est necessaire en effet de traverser ou déconstruire les croyances et les espérances qui nous en voilent la réalité toujours déjà là et toujours déjà donnée en plénitude.
Cependant, je crois utile de bien différencier la foi de la croyance, et de nous laisser résonner à ce vers quoi ce mot de « foi » pointe. A évacuer ce mot trop rapidement, peut-être risquons-nous de voiler une dimension essentielle de ce que nous sommes.
La foi, tel que je le comprends et que je le ressens, c’est une adhésion fondamentale de l’être à son propre dynamisme. En ce sens, la foi est première, elle est sans objet. C’est-à-dire qu’elle n’est pas foi en quelque chose (que ce soit foi en dieu, ou en l’homme, ou dans le progrès, ou dans l’évolution etc.) La foi n’est pas non plus quelque chose que nous avons. Tout simplement parce que c’est une des dimensions les plus profondes de ce que nous sommes. Et qui implique de manière indissociable la conscience — ou au moins l’intuition — d’un amour fondamental, tout inclusif. C’est en quelque sorte une confiance-source, qui est hors du temps, qui n’a rien à voir (comme le dit justement Maharishi) avec l’espoir en des temps meilleurs ou en des arrière-mondes. En ce sens la foi, qui est inconditionnelle, est le contraire de la peur, qui a besoin de sécurité. La peur est duelle, la foi est non-duelle.
Cela pointe, à mon sens, vers la profondeur de ce que dit Jésus lorsqu’il confirme : « ta foi t’a sauvé ». Il ne dit pas « ta foi en Dieu ou en moi ou dans la parole des prophètes t’a sauvé » ; ni « ta foi te sauvera » (dans le futur ou dans un autre monde). La foi sauve parce que c’est une dimension divine de ce que nous sommes, et qu’en elle l’adhésion à Dieu, au Monde, et à Soi, font un.
La foi donc est première, immédiate, alors que les croyances sont secondaires, dérivées. Les croyances sont l’objectivation mentale de notre foi dans un langage et dans une culture données.
Maintenant, bien qu’elles soient secondaires ou relatives, il ne faut pas dénigrer non plus les croyances trop rapidement, car elles sont inévitables et nécessaires. Les croyances nous donnent des repères et la capacité d’être ensemble. Par exemple, je crois que le boulanger me fait du pain qui ne va pas m’empoisonner, et c’est pour cela que je vais le lui acheter. Je crois si je suis scientifique que la logique rationnelle va me permettre de mieux pénétrer la réalité du monde et d’en échanger avec mes pairs. La plupart d’entre nous croient comme une évidence incontestable que nous sommes ici dans un corps individuel situé face à un monde fait de personnes et d’objets situés là-bas, à l’extérieur. Etc.
Nous voyons là que, sous l’évidence du sens-commun, il y a toujours des croyances métaphysiques implicites. Ces croyances ont une utilité sociale de premier plan. Sans croyances partagées, pas de société. Il y aura toujours des croyances, où que nous soyons, simplement, elles changent selon les structures de conscience que nous habitons.
Par conséquent, si nous voulons évoluer, nous devons laisser nos croyances se déconstruire. C’est le prix à payer.
Et plus nous nous abandonnons avec foi, plus nous pouvons oser laisser nos croyances se déconstruire. La peur, sinon, nous en empêche.
La foi, c’est donc simultanément la source de nos croyances et ce qui permet leur dissolution.
Salut à Vous, je partage totalement votre avis. Dans le livre Vivre Présent au 21 siècle, j’ai écrit: « L’espoir mène au désespoir ». Pourquoi ai-je écrit cela…. parce que l’espoir est passif…. aussi par pro-vocation 🙂
afin d’alimenter l’interrogation…